Transcription Les hommes du chemin de fer
[Musique entraînante]
« Parcelles d'histoire » Des récits fascinants de notre histoire canadienne.
Épisode 3 : Les hommes du chemin de fer
[Klaxon de train]
Montréal, Québec, 1939. Gare Windsor.
[Stanley] Comme je le disais, c’est un travail difficile, mais c’est le meilleur que tu pourras décrocher. Et ne t’attends pas à ce que les gens soient gentils, ni même polis. Aïeeee! Et fais-toi à l’idée que tu es invisible. Sauf quand quelqu’un a besoin de toi, alors tu as intérêt à être visible, et vite!
[Joe] Oh…
[Stanley] Ne t’en fais pas, Joe. Garde ton calme et fais ton travail. Nous sommes tous dans le même bateau.
[George] Bienvenue à bord, Joe!
[Conducteur] Allez, ça suffit. Arrêtez de papoter et commencez le ménage. Le train-couchette est retardé d’une demi-heure, alors on part à 8 h 30.
[Train qui gronde]
[Narrateur] Joe apprend à devenir portier avec George. Faire les lits… mettre la table… transporter les bagages… et même cirer les chaussures.
[Passager du train] J’ai une réunion importante demain, George, alors assure-toi qu’elles brillent.
[Passager du train 2] S’il y a une chose que ces hommes savent faire, c’est bien de faire briller les chaussures.
[Joe] Comment se fait-il qu’il sache ton nom?
[George] Oh, il ne le sait pas.
[Joe] Quoi?
[Passager du train 1] N’oublie pas de me réveiller à 6 h 30, George. Je veux aller déjeuner très tôt.
[Joe] C’est à moi que vous parlez, monsieur?
[Passager du train 1] Mais il n’y a personne d’autre ici, n’est-ce pas? N’oublie pas, 6 h 30 pile.
[Le tic-tac d'une montre]
[Stanley] On reprend le boulot à 3 h. Tu devrais aller dormir un peu, Joe. J’irai te réveiller à 1 h, pour que George puisse partir. C’est moi qui prends le dernier quart. Une fois levé, tu viendras t’asseoir ici. Tu peux somnoler un peu. Avec un peu de chance, on pourra déjeuner avant que le wagon-restaurant ne se remplisse.
[Klaxon de train]
Le lendemain matin
[Joe grommelle]
[Stanley] Allez, debout les braves!
[Ronflement]
[Klaxon de train]
[Joe] Allez Joe, reste réveillé! Cet après-midi.
[Passagère] Rappelez vos porteurs à l’ordre! Ce grand, là-bas, a été très impoli avec moi!
[Charles] Madame, j’ai eu peur pour votre sécurité lorsque vous avez ouvert la fenêtre. Vous auriez pu -
[Conducteur] Silence! Je suis terriblement désolé madame, au nom du chemin de fer, et je vous assure qu’il sera congédié dès que nous arriverons à Vancouver.
[Joe] J’ai vu ce qui s’est produit. Elle a passé son bras par la fenêtre et je venais de lui demander de ne pas le faire!
[Charles] Et parfois, c’est tout ce que ça prend.
[Joe] Tu ne voulais pas qu’elle se casse un bras, alors c’est TOI qui es congédié?
[Charles] Je vais essayer de trouver un boulot au CN. Sinon, je pense bien que le retour à la maison sera long, très long.
[Train qui gronde]
[Passager du train 3] Bonjour, George. Dans quelle direction se trouve le wagon-restaurant?
[Joe] C’est par ici, monsieur. Mais –
[Passager du train 3] Merci George!
[Les freins font un bruit strident]
[Stanley] Alors Joe, qu’as-tu pensé de ton premier voyage?
[Joe] Hum… pas certain. Y’a du bon et y’a du mauvais. Est-ce qu’on pourra véritablement dormir un jour?
[Charles] Mon ami, tu es gâté et tu ne le sais pas. Au moins, on peut roupiller un peu pendant ce quart de travail. La plupart du temps, on a à peine le temps de se retourner.
[Joe] Ben, au moins j’ai un travail. Et je suis un exemple pour mes petits cousins à la maison... Mais j’ai une question… Pourquoi est-ce que tout le monde me prend pour toi? On ne se ressemble même pas.
[George] Ce n’est pas grave. Pour eux, nous sommes tous George. C’est comme ça qu’ils appellent tous les porteurs, en l’honneur de l’homme qui a inventé le wagon-couchette, George Pullman.
[Charles] Oui, certains sont gentils et nous traitent bien, mais la plupart sont indifférents. Tout ce qu’ils veulent, c’est un lit bien fait et des chaussures bien cirées. Ici, tout le monde est ton patron.
[George] Mais un jour, je serai conducteur. Et j’aurai un porte-insigne. Et tout le monde saura pourquoi on m’appelle George!
[Charles] Ça, c’est si les porteurs noirs obtiennent un jour des promotions. Les choses doivent commencer à changer!
[Narrateur] Des années 1900 aux années 1950, le travail de porteur à bord des wagons-lits était l’un des rares bons emplois que pouvaient décrocher les hommes noirs au Canada. Cependant, le fait d’être noir les empêchait de se rallier aux syndicats de travailleurs des chemins de fer de l’époque. En 1917, des porteurs canadiens formèrent le premier syndicat de chemin de fer composé d’hommes noirs en Amérique du Nord. Au début, ils devaient travailler dans l’ombre, pour ne pas risquer de perdre leur emploi. Finalement, en 1945, le Brotherhood of Sleeping Car Porters signe une convention collective avec la compagne de chemin de fer Canadien Pacifique. La nouvelle entente accorde de meilleures conditions de travail et un meilleur salaire aux porteurs noirs. Le syndicat continue de lutter contre le racisme dans le secteur des chemins de fer et, en 1953, un porteur du nom de George Garraway, deviendra le premier conducteur noir au pays.
[Musique entraînante]
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