Paix et guerre en classe

Dans ce guide, les éducateurs expliquent comment ils enseignent la guerre et la paix, y compris des conseils, des ressources en ligne, des livres et des plans de cours.

Mis en ligne le 25 août 2022

Cette trousse pédagogique est inspirée de Canada en vedette, Épisode 1 : Guerre et paix.

Parler de la paix et de la guerre en salle de classe

Écrit par Kelly Hiebert, récipiendaire du Prix d'histoire du Gouverneur général pour l'excellence en enseignement 2021.

Notre histoire est marquée par des événements sur lesquels il importe de jeter un regard critique. Même les actes héroïques des Canadiens pendant la guerre sont ternis par le traitement discriminatoire réservé aux peuples autochtones, aux personnes de couleur et à d’autres groupes minoritaires. Il n’est pas facile d’enseigner la guerre et la paix au Canada, un épisode de notre histoire qui nous oblige à révéler aux élèves des exemples horrifiants de « l’inhumanité de l’homme envers l’homme », comme les survivants de l’Holocauste, Elie Wiesel et Primo Levi, l’ont décrit. 

Notre travail d’enseignant ne doit pas se limiter à parler des grands exploits du Canada, mais doit remettre en question les récits traditionnels qui continuent d’opprimer divers groupes au pays. Maintenant plus que jamais, nous sommes témoins de la polarisation de la société et de la recherche de boucs émissaires. Il faut savoir quel rôle a joué le Canada dans la perpétuation du racisme, de l’homophobie, de la xénophobie et de l’antisémitisme qui ont marqué l’histoire de notre jeune pays. Il faut mettre au défi les élèves, et nous‑mêmes, et jeter un regard critique sur les décisions du gouvernement. Par exemple, les déclarations d’un haut fonctionnaire du gouvernement sur les politiques d’immigration du Canada dans les années 1930 et 1940, à l’effet « qu’un seul soit déjà de trop », ont bloqué l’accès au Canada à de nombreux Juifs pendant les années précédant la Seconde Guerre mondiale et pendant le conflit.

Je nous invite tous à réfléchir aux paroles du lauréat du Prix Nobel, Elie Wiesel : « Parfois nous devons intervenir. Lorsque des vies humaines sont en danger, lorsque la dignité humaine est menacée, les frontières et les sensibilités nationales perdent leur pertinence. Partout où les hommes et les femmes sont persécutés en raison de leur race, de leur religion ou de leurs opinions politiques, ce lieu doit devenir, à ce moment-là, le centre de l’univers. »

Nous devons étudier les conflits, puisqu’ils ont façonné une bonne partie de l’histoire de l’humanité, mais il faut enseigner l’histoire complète — incluant les complexités et les nuances de l’époque. L’histoire ne se limite pas à mémoriser et à régurgiter des faits, mais elle doit permettre une compréhension des enjeux sous-jacents qui ont influencé les gens de l’époque. Il faut donner une voix à ceux qui ont été réduits au silence afin qu’ils ne soient pas oubliés. C’est ce que j’essaie de faire dans mes cours en proposant aux élèves des témoignages de survivants de l’Holocauste, habitant maintenant à Winnipeg, et qui étaient à cette époque du même âge que mes élèves. Même s’il est important de parler aux élèves des principaux acteurs de ce conflit, il ne faut pas oublier toutes les personnes qui ont résisté à ces conditions infâmes, et qui ont survécu.

Comme l’a écrit l’historienne canadienne, Margaret MacMillan, [TRADUCTION] « Nous pouvons apprendre de l’histoire, mais nous pouvons également nous tromper lorsque nous sélectionnons certains faits du passé pour justifier nos convictions ». Pour atteindre nos objectifs, il importe de créer un climat sécurisant et accueillant dans les salles de classe, où les élèves peuvent s’exprimer librement, faire partie du dialogue et soutenir ceux et celles qui sont vulnérables lorsque l’on aborde des sujets sensibles. J’évoque ici les histoires difficiles qui peuvent offenser ou blesser certaines personnes. Les élèves doivent être traités avec respect et de façon équitable. M. Janusz Korczak (Henryk Goldsmit), qui est un des pédagogues que je respecte le plus et qui a toujours défendu les droits des enfants a affirmé ce qui suit : [TRADUCTION]

 « Les enfants ne sont pas les adultes de demain, ils sont les adultes d’aujourd’hui. Ils ont le droit d’être pris au sérieux, d’être traités avec tendresse et respect. Ils doivent avoir le droit de devenir ce qu’ils souhaitent. La "personne inconnue" qu’ils cachent en eux est notre espoir en l’avenir. »   

Lorsque l’on réfléchit à ce que cela suppose d’enseigner la guerre et la paix dans l’histoire canadienne, il faut se rappeler qu’il y a plusieurs façons d’apprendre aux côtés des élèves pour les aider à tisser des liens pertinents entre le passé et le présent. C’est par ma propre expérience personnelle en tant qu’enseignant, père, frère et mari que j’ai adapté ma vision de l’enseignement à celle de l’éducateur et philosophe Paolo Freire, ainsi que ma façon d’enseigner, d’observer et d’interagir avec mes élèves.

J’invite tous ceux qui ont lu ce texte à réfléchir à ces derniers mots sur l’importance de l’histoire dans notre vie quotidienne. Ne craignez pas que vos élèves « brassent la cage », remettez en question les récits traditionnels de façon à les rendre plus inclusifs, et incarnez les changements dont vos élèves sont témoins au quotidien. Enfin, Freire a écrit : [TRADUCTION] « Revenir sur le passé ne doit être qu’un moyen de mieux comprendre qui ils sont afin de mieux bâtir l’avenir. » Je crois sincèrement que c’est l’objectif que doivent viser tous les enseignants, dans leur salle de classe et dans leur vie.

D’autres conseils des enseigenants

Comment enseigner la guerre et la paix?

J’ai commencé à enseigner mon module sur la « guerre et la paix » en me posant deux questions :

  • Quand et pourquoi le Canada a-t-il choisi la paix et quand et pourquoi le Canada a-t-il choisi la guerre?
  •  Les Canadiens sont-ils des gardiens de la paix? Devraient-ils l’être?

Nous travaillons à partir d’une échelle chronologique de la guerre et de la paix au Canada, débutant en 1100 EC « Constitution de la nation iroquoise : Grande loi de la paix » et se terminant par les décisions prises par le Canada dans le contexte du conflit entre la Russie et l’Ukraine, en accordant une attention particulière aux choix du Canada dans sa façon de composer avec les conflits et en tenant compte des répercussions de ces choix sur le Canada.

          – Jennifer Janzen, Winnipeg, Manitoba

Les mouvements de protestation peuvent être expliqués à partir de multiples points de vue. Par exemple, l’élève peut participer à une série de présentations « C’est moi l’enseignant » et approfondir un aspect d’une époque, comme les manifestations de jeunes lors de la Guerre du Vietnam ou contre les armes nucléaires pendant la Guerre froide. Une autre façon d’intégrer ces mouvements de protestation au programme consiste à examiner les mouvements de protestation actuels et à remonter à leurs origines, par exemple, Black Lives Matter, le mouvement abolitionniste et le mouvement pour les droits civiques. Il est essentiel d’analyser la continuité et le changement de ces mouvements quant aux objectifs atteints et à atteindre, et aux idées mises de l’avant pour concrétiser les objectifs de ces mouvements.

          – Shannon Leggett, North Vancouver, Colombie-Britannique

Enseigner la guerre et la paix au Canada requiert une approche équilibrée. Il faut utiliser des sources primaires dans différents formats pour refléter des perspectives multiples, soit celles des dirigeants, des personnes responsables de l’éclatement du conflit, jusqu’à la négociation de la paix, des soldats, des deux côtés du conflit, ainsi que des victimes innocentes qui ont subi les dommages et les destructions, sans oublier d’aborder les résultats des négociations de paix et des règlements. Au moyen d’une approche d’apprentissage axée sur l’enquête, les élèves sont encouragés à choisir un sujet, à poser une question de recherche et à démontrer leur compréhension et leurs apprentissages dans différents formats (visuel, multimédia, communication orale). Ils peuvent notamment s’intéresser aux batailles et stratégies, aux conséquences à court et à long terme de la guerre sur les victimes, à la guerre du point de vue des artistes et des caricaturistes, des poètes et des écrivains. Cela permet aux élèves d’établir des liens personnels avec leur recherche et alimente leur curiosité à l’égard du projet.

          – Katy Whitfield, Toronto, Ontario

Lorsque l’on parle de l’identité canadienne, mes élèves évoquent souvent la réputation du Canada en tant que gardien de la paix. Je les encourage à se pencher sur les origines de cette réputation et sur le rôle que la guerre a joué dans notre identité. Nous étudions la façon dont les conflits internes, comme les rébellions du Haut et du Bas Canada, et la résistance de la rivière Rouge et du Nord-Ouest, ont mené au Canada que nous connaissons aujourd’hui. Nous explorons la façon dont notre participation à la Première Guerre mondiale nous a permis d’acquérir une plus grande indépendance et de solidifier notre identité nationale, et nous nous demandons comment la réputation du Canada à l’international a été ternie par la décision de participer à certains conflits plutôt qu’à d’autres. Nous étudions la création du concept de maintien de la paix moderne et nous nous demandons si le Canada est à la hauteur de sa réputation à cet égard. Bien entendu, nous étudions également les guerres livrées aux populations autochtones et cherchons à savoir si un pays construit sur une telle violence pourra un jour être considéré pacifique.

          – Katie Tressel, Langley, Colombie-Britannique

L’idée de la guerre et de la paix au Canada peut être enseignée en montrant comment deux grands Canadiens se sont distingués sur la scène internationale pour préserver la paix mondiale : John Humphries et Lester B. Pearson. On présente aux élèves les Minutes du Patrimoine sur ces deux personnages pour susciter leur intérêt au sujet du maintien de la paix, mais également pour lancer une discussion sur le rôle du Canada dans les missions internationales de maintien de la paix.

          – Emilia Adorante, Thornhill, Ontario

Comment rendre le sujet de la guerre et de la paix pertinent et intéressant pour les élèves?

Lorsque l’on aborde le sujet du Canada et de la Deuxième Guerre mondiale, je demande à mes élèves de s’intéresser à cet événement à partir de trois perspectives différentes. Ils commencent par choisir un événement ayant une importance historique. Ensuite, ils déterminent les causes à court terme de l’événement et le replacent dans son contexte historique, en se référant à la chronologie du conflit. La prochaine étape consiste à déterminer la pertinence historique en examinant les répercussions, les révélations de ceux qui étaient impliqués et les changements qui en ont résulté. Enfin, les élèves décrivent trois objets qui auraient appartenu à différentes personnes en lien avec cet événement, et l’usage qu’elles en faisaient. En appliquant la stratégie d’apprentissage du biopoème, les élèves présentent les résultats de leurs recherches en expliquant comment cet objet a été témoin des décisions et des gestes posés par son utilisateur.

          – Katy Whitfield, Toronto, Ontario

La guerre qui oppose la Russie et l’Ukraine constitue un point de départ pour les élèves. Ils sont très inquiets et anxieux relativement à ce conflit. Je commence par la « paix », car je veux que les élèves sachent qu’il y a d’autres options, et que le Canada a choisi celle de la non-violence dans de nombreuses circonstances. Nous étudions également des documents primaires et secondaires, regardons des vidéos sur YouTube, visitons des monuments locaux érigés à la mémoire des anciens combattants, et au printemps dernier, nous avons visité le Musée de l’aviation royale pour comprendre le rôle de l’aviation canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale.

          – Jennifer Janzen, Winnipeg, Manitoba

La guerre est généralement un sujet qui intéresse les élèves. Ils ont une connaissance culturelle suffisante des événements, comme les deux guerres mondiales, pour vouloir en savoir plus sur le rôle du Canada. Je trouve également qu’il est très stimulant de demander aux élèves comment ils décrivent leur pays : la dissonance entre les stéréotypes qu’ils connaissent (« les Canadiens sont gentils et s’excusent constamment ») et l’histoire qu’ils apprennent donne lieu à des conversations passionnantes. 

          – Katie Tressel, Langley, Colombie-Britannique

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Série de vidéos sur la Grande Guerre

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De Grandes Canadiennes

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Plans de cours et activités sur la paix et la guerre

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