Symboles de l’histoire de la mode
Dans le cadre de cette activité en classe, les élèves se pencheront sur une sélection d’artéfacts textiles qui nous en disent plus long sur la mode féminine au fil de l’histoire canadienne. On demandera aux élèves d’analyser chaque pièce et d’identifier les symboles représentés par les vêtements. Ils en apprendront davantage sur les facteurs sociaux qui ont influencé la structure et le style des vêtements, ainsi que sur les personnes qui les portaient.
Cette activité est inspirée du numéro sur Nos symboles du magazine Kayak : Navigue dans l’histoire du Canada.
Concepts de la pensée historique :
- Établir la pertinence historique
- Utiliser des sources primaires
- Dégager la continuité et le changement
Les vêtements que nous portons disent au monde qui nous sommes. Ils sont un prolongement de notre personnalité, de notre créativité et peuvent être une forme d’expression. Ils reflètent non seulement qui nous sommes, mais la société dans laquelle nous vivons. Ainsi, l’étude d’artéfacts textiles nous apprend les mêmes choses sur les gens qui les ont portés par le passé. Chaque vêtement est chargé de symboles, qui s’expriment dans la structure du vêtement, le choix des couleurs, le tissu employé et même celui ou celle qui le porte. La mode évolue constamment et en étudiant certaines pièces de vêtement, nous en apprenons davantage sur les gens qui nous ont précédés et sur la société dans laquelle ils vivaient.
Activité :
Commencez la leçon par une discussion en classe ou en petits groupes et posez les questions suivantes :
- Comment avez-vous décidé quoi porter aujourd’hui?
- Que voulez-vous transmettre aux autres à votre sujet par vos vêtements?
- Qui détermine ce qu’est le style? Qu’est-ce qui fait qu’un vêtement est à la mode?
- Qu’est-ce qui est à la mode ou en vogue aujourd’hui?
- Suivez-vous les modes?
- Est-il important d’être à la mode?
Vous pouvez imprimer des copies des images ci-dessous, les projeter à l’écran ou demander aux élèves de les afficher sur leur tablette ou un autre appareil numérique. Demandez à vos élèves de répondre aux questions sur ces artéfacts. Lorsqu’ils auront fait part de leurs premières impressions, donnez-leur plus de détails sur l’histoire de cette robe.
Artéfact 1 et Artéfact 2 :
Contexte :
L’image i représente une robe à jupe large, en forme de dôme (la plus large pour le siècle), contrastée par un corset soulignant l’étroitesse de la taille. Les tissus, soit de la soie, du taffetas, de la dentelle et des rubans, évoquent la délicatesse et la fragilité. La jupe large est soutenue par une crinoline, pour en maintenir la forme, autant à l’avant qu’à l’arrière. La petite taille et les lignes nettes du corsage reposent sur la structure du corset. Chaque sous-vêtement servait à créer une silhouette très féminine, une caractéristique attendue de chaque femme à la mode de son temps.
Ces éléments symbolisent le rôle des femmes dans la société du 19e siècle. Le comportement et l’apparence physique des femmes de l’époque devaient répondre à des exigences très strictes. Les femmes étaient tenues de se conformer à cette idée de la féminité. Il aurait été difficile de bouger en portant cette robe, en raison de sa structure et de son poids. Le simple fait d’entrer dans une pièce devenait en obstacle du fait de la largeur de la jupe.
L’image ii propose une silhouette un peu différente, qui illustre les changements constatés à la fin de cette décennie. La partie la plus imposante de la jupe est ramenée à l’arrière, tout en étant plus amincie à l’avant. Même si la jupe est un peu moins large, elle est tout de même soutenue par une crinoline et surmontée d’un corset. La robe reste encore difficile à porter pour se déplacer dans des couloirs et cadres étroits.
La société victorienne était séparée entre deux sphères très distinctes, en fonction du sexe : la sphère publique et la sphère domestique. Les femmes occupaient la sphère domestique et s’occupaient de toutes les tâches de la maison, comme l’entretien et l’éducation des enfants. Les femmes qui devaient travailler occupaient des emplois de domestiques, et effectuaient des tâches ménagères, comme la couture et le ménage.
La sphère publique concernait tout ce qui est extérieur à la maison et était dominée par les hommes. Ces derniers circulaient librement dans les rues et exécutaient diverses tâches publiques; leur mode reflète d’ailleurs ces occupations. Les hommes devaient être libres de leur mouvement, alors que les femmes étaient entravées. La vie des femmes se déroulait essentiellement à la maison, et elles ne pouvaient effectuer aucune tâche exténuante.
Le discours des médecins de l’époque victorienne appuyait cette distinction des rôles; les avantages de l’activité physique n’étaient valables que pour les hommes et les garçons. Les femmes étaient fortement encouragées à renoncer à toute forme d’activité physique. Elles étaient perçues comme étant si fragiles que leur constitution ne supporterait pas une activité sportive. Et pire, l’activité physique pouvait nuire à leur capacité de porter des enfants. Ces rôles genrés très définis apparaissent clairement dans la mode des femmes de l’époque, en limitant leur liberté de mouvement.
Nous savons que la robe de l’image i a été portée par une femme de la famille Molson à Montréal, au Québec. Sur cette robe, on trouve plusieurs symboles associés à la richesse : les médaillons appliqués de perle, la dentelle, l’étroit galon de tulle et d’autres médaillons sur les manches, qui se terminent par un étroit ruban de soie.
Questions :
- Quelles images vous viennent à l’esprit lorsque vous voyez cette robe?
- Qui portait cette robe?
- À quelles occasions portait-on une telle robe?
- Pensez-vous qu’il était facile de bouger dans une telle robe?
- En quoi est-elle différente de ce que l’on porte aujourd’hui?
- Pensez-vous que la femme qui a porté cette robe l’a elle-même confectionnée?
Artéfact 3 :
Contexte :
Voici une robe de mariage de 1878, mais vous ne l’auriez sans doute jamais deviné en raison de sa couleur. Au Canada, et dans de nombreuses cultures occidentales, le blanc est la couleur traditionnelle des mariées. C’est la reine Victoria qui a lancé cette mode lors de son propre mariage, en 1840, soit près de 30 ans plus tôt. Pour Victoria, le blanc symbolisait l’innocence, la pureté et le romantisme, et il s’agissait d’un choix délibéré faisant contraste avec son image royale. Pendant des années après le mariage de Victoria, le blanc est demeuré un symbole de la féminité pour les mariées et renforçait les valeurs de pureté et d’innocence.
Mais le blanc est également une couleur de grand luxe. Les mariées n’avaient pas toutes les moyens de commander une robe aussi extravagante ne servant qu’une seule fois. Les femmes des classes moyenne et ouvrière préféraient souvent d’autres couleurs pour leur robe de mariée, afin de pouvoir la porter à plusieurs occasions, comme on le voit sur cette image. Le prune était une couleur à la mode, une teinture de cette couleur ayant été récemment découverte, et rendait ce vêtement beaucoup plus polyvalent. De plus, une robe blanche, facilement salie, était très peu pratique pour les femmes des classes moyenne et ouvrière, puisque son nettoyage aurait été une tâche longue et coûteuse.
Questions :
- En quoi cette robe est-elle différente de ce que l’on porterait aujourd’hui?
- Comment les couleurs de nos vêtements ont-elles évolué au fil du temps?
- Est-ce que nous cherchons encore des vêtements à porter à de multiples occasions? Qu’en est-il des vêtements qu’on ne porte qu’une seule fois?
- Est-ce que la couleur véhicule les mêmes symboles aujourd’hui?
Artéfacts 4 et 5 :
Contexte :
Les années 1920 sont une période de grandes transformations sociales. Ces deux robes (images iv-vii) sont caractéristiques de la mode féminine populaire de l’époque. Les deux robes sont peu structurées par rapport aux styles dominants des années précédentes. La coupe ample de la robe tombait droit sur le corps et présentait une silhouette plus carrée, camouflant les courbes ou la taille naturelle. Il s’agissait alors d’un style radical qui rejetait l’idée selon laquelle les vêtements féminins devaient embellir les formes traditionnelles des femmes (petite taille, hanches larges).
La longueur était également révolutionnaire, puisqu’elle permettait de montrer une partie de la jambe et donnait une plus grande liberté de mouvement. Cette caractéristique était très importante pour les jeunes femmes qui aimaient sortir dans les boîtes de nuit pour danser! Les robes dans ce style, comme celles présentées ci-dessus, comportaient des éléments mis en valeur par le mouvement. Les volants superposés sur l’image iv se déployaient et s’ouvraient comme une corolle à chaque pas de danse virevoltant. De la même façon, les perles suspendues des images v-vii donnaient vie à la robe à chaque léger mouvement. Ces deux modèles exquis appartenaient fort probablement à des femmes riches, si l’on se fie au tissu utilisé. Cependant, le style de la robe, la coupe ample et la forme carrée étaient faciles à reproduire pour les femmes des classes moyenne et ouvrière. Ces robes n’exigeaient pas de sous-vêtements structurés coûteux et très élaborés, et rendaient ce style plus accessible à toutes les femmes.
La liberté de mouvement est un symbole très important à cette époque. Non seulement ce style permet une liberté de mouvement lors d’activités physiques, comme la danse ou la marche (les femmes ne sont plus coincées dans les cadres de porte!), mais il ouvre également la voie à une plus grande mobilité sociale. Dans la société d’après la Première Guerre mondiale, le monde a soudainement changé. Les exigences sociales rigides d’avant-guerre n’ont plus leur place dans les années 1920. Ceux qui ont survécu la guerre ne veulent plus se plier aux diktats sociétaux de la génération de leurs parents.
Les femmes qui ont travaillé dans les usines pendant la Première Guerre mondiale gagnaient leur propre argent. Pour la première fois, elles pouvaient dépenser leur argent comme bon leur semblait. Bon nombre d’entre elles se mettent à fréquenter des bars et boîtes de nuit, on les appelle les flappers et elles sont un symbole de leur génération. Les flappers se moquent des conventions sociales, elles boivent de l’alcool dans des lieux publics (autrefois réservés aux hommes), elles dépensent leur argent à leur guise et passent beaucoup plus de temps hors de la maison. Les flappers sont des rebelles de leur époque et elles montrent aux autres femmes la voie vers une nouvelle liberté.
Questions :
- Pensez-vous qu’on peut bouger facilement dans ces robes?
- Comment peut-on les comparer avec des exemples de robes d’époques antérieures?
- Qui selon vous portait ces robes?
- En quoi sont-elles différentes de ce que l’on porte aujourd’hui?
- Pourquoi le manque de structure est-il important?
Artéfact 6 :
Contexte :
La collection révolutionnaire « New Look » de Christian Dior est présentée en 1947. Chaque pièce de la collection propose des épaules arrondies, une taille cintrée et une jupe ample. Dior célèbre à nouveau l’ultra-féminité, après des années de pénuries et de restrictions, marquées par les vêtements utilitaires de la Seconde Guerre mondiale.
Cependant, le New Look de Dior n’est pas complètement nouveau. Les silhouettes de cette nouvelle collection reposent sur des vestes cintrées et des hanches rembourrées, pour accentuer la taille fine traditionnelle, et de longues jupes évasées : tous ces styles étaient très populaires avant la Seconde Guerre mondiale. Même si elle paraît moderne, la collection de Dior n’est pas sans rappeler les corsets et crinolines du siècle précédent.
Même si Dior célèbre la renaissance de l’industrie de la mode à Paris et même si les femmes de toutes les classes sociales et de partout dans le monde adoptent son New Look, ces styles ultra-féminins symbolisent un retour à la sphère domestique pour les femmes. Des années 1920 jusqu’aux années 1940, les femmes entrent graduellement dans l’arène publique. Il y a plus de possibilités d’emplois pour elles et les femmes canadiennes obtiennent le droit de voter. Toutes ces libertés sociales se reflètent dans la mode de cette époque.
Et pourtant, dans le sillage des horreurs de la Deuxième Guerre mondiale, de nombreux Canadiens jugent que leur monde a radicalement changé et sont sortis traumatisés de ce conflit. En réaction à ce sentiment, on veut absolument recréer une impression de normalité, et revenir à ce qu’était la vie avant la guerre. Ainsi, les femmes qui occupaient des emplois pendant la guerre ont été remplacées par des hommes, elles ont été invitées à regagner leur foyer et à reprendre leur rôle de mère en charge de la maison. Le Canada reviendra donc à une certaine normalité, au détriment des libertés des femmes. Pour de nombreuses femmes, le style ultra-féminin de Dior symbolise un retour vers des rôles genrés plus rigides.
Questions :
- En quoi ces vêtements sont‑ils différents de ce que l’on porte aujourd’hui? Sont‑ils si différents que cela?
- Comment ce manteau se distingue-t-il des robes présentées au début de la leçon (datant d’un siècle plus tôt)? Qu’est-ce qui a changé?
Activité d’enrichissement :
Demandez à vos élèves de parcourir la collection textile du Musée McCord. Laissez-les choisir le vêtement qu’ils trouvent le plus intéressant et demandez-leur de rechercher les symboles que représente ce vêtement. Invitez-les à répondre aux questions suivantes :
- Qui a porté ce vêtement?
- Connaissez-vous son nom, ou savez-vous qui a donné ce vêtement?
- À quelle classe sociale appartenait cette personne, selon vous?
- À quelle fin ce vêtement servait-il?
- Était-il porté au quotidien ou pour des occasions spéciales?
- Qu’est-ce qui est particulièrement intéressant au sujet de ce vêtement?
- P. ex. est-ce que c’était la première fois qu’on utilisait une machine à coudre, s’agit-il d’un nouveau style, en quoi est-il unique?
- À quelle époque ce vêtement était-il porté?
- Quelles grandes influences de cette époque ont inspiré le style de ce vêtement?
Demandez à vos élèves de monter une exposition sur les vêtements d’aujourd’hui. Quels styles présenteront-ils? Qu’est-ce que les vêtements symbolisent dans notre société aujourd’hui?
Ressources :
- Musée canadien de l’histoire, La mode féminine véhiculée par les catalogues
- Musée canadien de l’histoire, Vêtements des dames
- Musée canadien de l’histoire, Vêtements des hommes
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