Le patrimoine religieux transformé : Le Canada

Dans les dix provinces et les trois territoires canadiens, de nombreux lieux de culte à l’importance historique indéniable ont été transformés, fermés ou détruits. Chaque lieu possède son histoire unique, ainsi que des acteurs qui ont joué des rôles cruciaux dans la sauvegarde — ou la destruction — d’églises et autres lieux religieux.

Écrit par Mathieu Drouin

Mis en ligne le 7 février 2019

Dans les dix provinces et les trois territoires canadiens, de nombreux lieux de culte à l’importance historique indéniable ont été transformés, fermés ou détruits. Chaque lieu possède son histoire unique, ainsi que des acteurs qui ont joué des rôles cruciaux dans la sauvegarde — ou la destruction — d’églises et autres lieux religieux.

Certaines transformations sont remarquables tant par leur démarche que par leur résultat, d’autres sont tout à fait déplorables. Comme promis dans l’article introductif dans lequel nous avons établi les critères d’une transformation réussie, nous allons maintenant observer quelques cas remarquables au Canada.

Des exemples de réussite...

La Maison Étoile (Église Saint-Norbert-de-Kent), Saint-Norbert (Nouveau-Brunswick)

L’église Saint-Norbert-de-Kent a été bâtie en 1956 dans la paroisse de Saint-Norbert, en Acadie. En 2016, l’archidiocèse de Moncton, propriétaire des lieux, songeait à détruire le lieu de culte. Une écrivaine originaire de l’endroit, Marguerite Maillet, est intervenue dès qu’elle a appris la nouvelle.

La transformation du lieu est unique : un centre dédié à la littérature jeunesse ouvert durant la période estivale. Réalisée avec un budget modeste (environ 20 000 $), la Maison Étoile est une démonstration d’implication sociale et de collaboration entre les autorités diocésaines et les gestionnaires de projet. Avec ce projet novateur destiné aux enfants de toute la région, le diocèse a trouvé une nouvelle fonction à l’église, tout en en restant le propriétaire.

WestEnd Commons (Église St. Matthew’s), Winnipeg (Manitoba)

Rarissimes sont les projets domiciliaires respectant les critères d’une transformation réussie. WestEnd Commons, à Winnipeg, est l’un d’entre eux. Au cours des années 2000, l’Église anglicane St. Matthew’s était devenue trop onéreuse à entretenir pour sa congrégation. Le bâtiment de 1947 a donc été transformé en organisme d’habitation à but non lucratif destiné aux familles en situation vulnérable.

L’intégration des 26 appartements et des lieux communs dans la structure de l’église tout en préservant son architecture distinctive fait toute la pertinence de ce projet. De plus, un temple plus petit, convenant aux besoins des fidèles, a été aménagé. En somme, WestEnd Commons s’avère être un exemple dans la transformation responsable d’un lieu de culte en habitation.

...et des exemples à ne pas suivre

St. Ansgarius Swedish Church, Thunder Bay (Ontario)

Les précédents articles ont mis en lumière des destructions faisant fi de la valeur patrimoniale, voire du classement historique d’un lieu de culte. C’est exactement le cas de la St. Ansgarius Swedish Church, à Thunder Bay. L’église a été construite au début du 20e siècle sur la rue Secord et a servi au culte de plusieurs groupes religieux protestants. Transformé en résidences en 1986, l’ancien lieu de culte a été mal entretenu, puis laissé à l’abandon.

S’en est suivi une lente décrépitude causée tant par le manque d’entretien du propriétaire que par le laisser-aller des autorités municipales, qui avaient pourtant désigné le lieu comme historique. En juin 2018, le pic des démolisseurs était à l’œuvre, effaçant une trace importante de l’immigration suédoise dans la région.

Erie Street United Church, Ridgetown (Ontario)

La Erie Street Methodist Church, construite en 1875, est devenue la Erie Street United Church en 1925. Le lieu de culte protestant a été occupé pendant près de 135 ans, avant d’être rasé en 2009. Ses fiduciaires avaient pourtant reçu une offre d’achat répondant à leurs critères, mais ont commencé la démolition pendant les discussions entourant la vente.

Qu’une église soit détruite par sa propre congrégation semble déjà illogique. Mais que les autorités municipales et provinciales ne soient pas intervenues — ne serait-ce que pour retarder la démolition — alors que la communauté avait mené à bien d’importantes et sérieuses démarches de préservation l’est encore plus.

Mathieu Drouin est historien spécialiste des religions. Il évolue présentement comme coordonnateur en médiation culturelle au Pôle Culturel du Monastère des Ursulines, entre autres projets.

Cet article est aussi offert en anglais.

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