Deuxième forum national sur l'histoire du Canada
D’où viennent vos connaissances en histoire? Aviez-vous confiance en votre professeur d’histoire? Et qu’en est-il des musées, de votre grand-père ou des articles dans les journaux locaux? Et même du Beaver? Ce sont les sujets qu’ont abordés les participants au 2e Forum annuel national sur l’histoire du Canada de la Société Histoire Canada, qui s’est tenu le 13 février 2009. Le Forum, qui a eu lieu en même temps que le Forum des enseignantes et des enseignants sur la démocratie parlementaire canadienne, et qui s’est déroulé sur la colline du Parlement, s’est révélé une occasion unique pour les penseurs John Ralston Saul et Peter Seixas d’aborder ces sujets avec plus de 100 enseignants de partout au Canada.
La question de la confiance historique a servi de point de départ à une vaste discussion sur l’éducation et les connaissances du public. « L’Institut de Dominion a mené des sondages pour mesurer ce que les Canadiens savent et ne savent pas sur leur passé, souligne M. Seixas, mais que faut-il faire maintenant pour évaluer la littératie historique du public? »
M. Seixas se penche actuellement sur la façon dont les Canadiens découvrent leur passé et y ont recours dans leur vie quotidienne, dans le cadre du projet Les Canadiens et leurs passés. Ses recherches visent à déterminer comment les jeunes canadiens comprennent l’histoire qui leur est présentée à l’école. Il constate que même si les élèves font souvent appel à des techniques complexes pour analyser le passé, il reste encore beaucoup à faire à cet égard. «
À l’exception de certains exercices faisant appel à des ressources primaires, jusqu’à présent, nous n’avons pas réussi à formuler clairement ces techniques afin que les élèves puissent démêler les dilemmes de la continuité et du changement, des causes et des conséquences et de la dimension éthique de l’histoire… Il ne suffit pas de se rappeler tout ce qu’il y a dans le manuel, il faut maîtriser ces problèmes afin de devenir compétent en histoire ». John Ralston Saul, un des plus grands auteurs canadiens, est d’accord avec M. Seixas. « Il faut vraiment s’éloigner de l’idée selon laquelle une poignée de faits forment la base de notre histoire. C’est un problème véritable. D’une certaine façon, la plupart des faits exposés pour expliquer l’évolution de l’histoire du Canada ont été figés dans le temps, vers la fin du 19e siècle, et ne peuvent plus être considérés comme des faits. »
M. Saul a récemment terminé un nouvel ouvrage, A Fair Country, où il remet en question la vision traditionnelle des fondements du Canada. Il décrit l’histoire comme une forme de positionnement politique survenu vers la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle, une approche qui continue d’aller de soi aujourd’hui, plutôt que d’être étayée par des faits réels sur l’évolution de notre nation. Il donne en exemple le choix d’Ottawa comme capitale de notre pays, et explique à quel point les Canadiens ont été trompés au sujet des intentions originales des Pères de la Confédération. « Ottawa a été choisie par le gouvernement du Canada et le Parlement, l’intervention de la Reine était une ruse. Malgré cela, le premier ministre et les maires prononcent des discours et les professeurs d’histoire sont obligés d’enseigner que c’est la Reine qui a choisi Ottawa. Ce faisant, nous continuons de nous représenter comme une petite colonie alors qu’en fait, ce choix découle d’une décision qui s’est révélée très difficile à prendre. »
« Et quel est le résultat direct de cela aujourd’hui? s’interroge M. Saul. Eh bien, on continue de dire à travers le pays qu’Ottawa n’est pas la capitale naturelle du Canada, qu’Ottawa n’a pas été le bon choix, tous ces commentaires découlant du mythe selon lequel cette décision a été prise par une vieille femme un peu obèse qui n’avait jamais mis les pieds au pays. Ce sont ces erreurs qui rendent ces mythes possibles. Une fois que l’on a compris que cette ville a été choisie par les Canadiens, pour les 32 Canadiens, alors l’histoire change du tout au tout. » La présidente et directrice générale de la Société Histoire Canada, Deborah Morrison, juge que même si ces présentations sont toujours controversées, elles n’auraient jamais pu être exposées il y a dix ans et qu’il semble maintenant que le moment soit propice à un examen plus approfondi de notre histoire.
« Il se passe aujourd’hui quelque chose de très stimulant, poursuit M. Seixas. Nous disposons maintenant d’un vaste corpus de recherches sur l’enseignement de l’histoire, ce qui n’était pas le cas en 1990 en Amérique du Nord… Ces discussions qui étaient au départ acrimonieuses commencent maintenant à atteindre une certaine maturité, alors que les intervenants des diverses institutions mobilisées à cette époque sont maintenant prêts à travailler ensemble. » « La situation évolue et on se prépare soudainement à quelque chose qui a toujours été là », ajoute M. Saul.
Merci à Geoff Ives pour son aide lors de la rédaction de cet article.
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