Patrilinéaire, mitochondriale et agnatique : trois façons de faire votre généalogie!

Trois façons de faire s’offrent à l’individu ayant soif de passé qui veut se lancer dans la généalogie : les méthodes patriarcale, mitochondriale et agnatique.

Par Mathieu Drouin

Mis en ligne le 6 octobre 2015
dessin - généalogie

Faire sa généalogie est l’occasion de plonger dans sa propre histoire et de voyager à travers l’espace, le temps et les mœurs. Sous la casquette de l’enquêteur, on dépèce et épluche les registres d’antan, décode des informations complexes et recompose des récits de vie parfois touchants, surprenants, voire emplis de gloire. Avant d’avoir procédé à ces recherches, il est difficile de savoir si l’un de nos ancêtres lointains est un noble privé de sa terre, un briquetier tapageur, un criminel repenti ou un héros de guerre. Trois façons de faire s’offrent à l’individu ayant soif de passé qui veut se lancer dans la généalogie : les méthodes patriarcale, mitochondriale et agnatique.

La manière la plus connue — et généralement la plus aisée — de reconstruire son ancestralité est la généalogie patrilinéaire. Elle consiste à remonter le fil de l’histoire de fils en père en se donnant pour base de travail un nom de famille. Cependant, plusieurs embûches se dressent sur la route de l’amateur. La première est simplement la fantaisie orthographique des annalistes d’antan — qu’ils soient prêtres ou notaires —, qui mutilent les patronymes en les affublant de lettres supplémentaires ou même de syllabes déformées au gré des accents régionaux. La seconde est la prééminence d’un surnom, au détriment du nom de famille connu en aval des générations. Notre ancêtre brouille ainsi ses propres empreintes historiques, au grand malheur de ceux qui s’intéressent à lui. Heureusement, quelque consciencieux rédacteur d’antan aura noté à la fois le sobriquet et le legs patronymique. En procédant de fils en père (et en mère), la généalogie patriarcale recomposée aura la forme d’une échelle à remonter dans le temps, où chaque barreau correspond à une génération plus ou moins bien révélée par les traces qu’elle a laissées. Bien souvent, cette forme de recherche fait office de mise en bouche pour l’étape suivante : la généalogie mitochondriale.

Puisque nos traits génétiques sont hérités en parties égales de notre père et de notre mère, la généalogie mitochondriale — également nommée matrilinéaire — devient un incontournable lorsque vient le temps de terminer un arbre de famille. Il s’agit alors, parfois contre l’instinct induit par une société historiquement patriarcale, de remonter le courant des gènes par les femmes, de fille en mère. Si les mœurs de nos ancêtres avaient donné aux fils le nom de leur génitrice, le paysage patronymique — il serait en fait matronymique — différerait complètement de celui que nous connaissons. Le défi posé par la généalogie par les femmes est considérable : le nom de famille change alors à chaque génération, ce qui n’empêche pas qu’il ait pu être malmené ou supplanté par un surnom. Le résultat de la généalogie mitochondriale est semblable par la forme à la généalogie patrilinéaire. En outre, l’impact de femmes prolifiques est plus facilement visible — on peut alors penser aux fameuses Filles du Roy, ces orphelines françaises volontaires à immigrer au Nouveau-Monde pour peupler la colonie française.

La conjugaison des généalogies patriarcale et mitochondriale résulte en un arbre généalogique complet, c’est-à-dire une reconstitution entière de nos patrimoine et matrimoine génétiques. L’arbre ainsi obtenu peut avoir la forme d’un éventail de demi-cercles concentriques à la fois pénible et fascinant à compléter (vous trouverez un canevas de base imprimable et en grand format ici) Il surviendra presque inévitablement des recoupements entre les ramifications, et parfois beaucoup plus rapidement que l’on pense. Il était en effet commun de se marier entre petits cousins, il n’y a pas si longtemps. Si l’on ne rencontre aucun recoupement, on devra dénombrer 2^10 ancêtres différents à la dixième génération, soit 1 024 individus ! Au quinzième palier, vers la moitié du XVIIe siècle, se retrouveront au plus 32 768 personnes, total dix fois supérieur à la population « canadienne » de l’époque.

Le généalogiste en manque de défi pourra se lancer ensuite dans la généalogie agnatique. Celle-ci consiste à partir de l’ancêtre de son choix, qu’il soit homme ou femme, et de faire la liste de ses descendants. Cela est d’autant plus intéressant lorsque le point de départ est une femme, car son nom n’aura généralement pas été transmis aux générations suivantes, ce qui permet de découvrir les liens de parenté entre différentes familles. Peut-être partagez-vous le même ancêtre que Madonna, Sydney Crosby ou Jim Carrey, qui sait ? De plus, les différences démographiques intergénérationnelles apparaissent clairement en utilisant cette méthode. Vous serez sans doute surpris du nombre d’enfant qu’ont eus vos aïeuls, ou du nom que ceux-ci ont donné à leur progéniture !

Qu’importe la méthode choisie, la généalogie révèle les itérations quasi inévitables de nos ancêtres. En raison d’une contrainte financière, d’un désir d’aventure ou d’une histoire d’amour, beaucoup de nos aïeuls étaient de grands voyageurs, parcourant des milliers de kilomètres à pied, à cheval ou en train pour accomplir leur destinée. Ainsi, chaque arbre généalogique constitue un roman historique où des personnages plus grands que nature s’assemblent et assemblent du même coup l’histoire canadienne telle que nous la connaissons.

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